mardi 28 juillet 2009

Pédophilie mentale.


Cher Konstantinos,

Je m'émerveille de votre constat. Votre propos est lourd de sens et nombreux sont les nécessiteux qui devraient en prendre quelque substance. Votre entendement sur la conscience du monde déjà présente dans nos êtres est pour moi plus que novateur. En effet, je suis de ceux qui pensent qu'un enfant possède à sa naissance toute la génétique du monde, c'est-à-dire une sorte de potentiel faramineux d'idées et de valeurs variées.
Je vous accorde par ailleurs que la parole est un négatif de l'image mais la notion d'intime est, elle aussi, un brûlot pour nos conceptions plurielles des choses. Elle réduit à l'unique. Nous entamons donc une déconstruction.
Je m'explique. Lorsqu'on dépasse un certain âge, probablement les sept années d'existence puisqu'elles sont définies comme raisonnablement acquises au bout de la septième, notre conscience du monde commence à s'amenuiser sous l'égide de la pensée maternelle. La matriarchie est subventionnée par l'intime. « C'est parce que je suis ta mère que je décide de ce qui est bien pour toi », « je te connais mieux que personne, c'est moi qui t'ai mis au monde », comme si, finalement, la souffrance de l'accouchement devenait gage suprême de la matriarchie.

Mais une mère connaît-elle vraiment son enfant ? Est-ce que cette connaissance n'est pas obscurcie par une volonté farouche et égoïste de vouloir contrôler la progéniture ?

Je conçois l'enfant comme un prolongement clitoridien de la mère. Celle-ci en use et abuse pour son plaisir privé. Ceci étant encore accentué lorsque le mari se définit à l’image d’un incapable orgasmique. Il n'y a rien de plus jouissif pour une mère que de retrouver une forme d'emprise sur sa descendance. Cet assujettissement est d'autant plus fort lorsque l'enfant traverse une période de crise. Il existe donc une forme de plaisir masochiste de la mère. Il se situe à la fois entre douleur et orgasme, respectivement parce que son enfant est fragile et parce qu'elle retrouve son influence de dépendance suscitée par cette fragilité. Le concept de la mamma italienne en est le plus brillant exemple. Ajoutez à cela un brin de religiosité et on aboutit à un maternalisme fascisant qui pousse notamment les fils à une délinquance accrue. Je reviendrai ultérieurement sur la relation mère-fille, dont le schéma est presque similaire, à cette exception près que la fille possède vis-à-vis de sa génitrice une adhésion à son discours quasi inaliénable. Bien sûr il ne faut pas généraliser, d'autres facteurs sociologiques sont aussi en cause mais ce n'est pas le propos de ce courrier. Entendez-moi bien : mon propos n'est pas une question d'éducation mais bien une schématisation du formatage maternel. Certes l'éducation peut effectivement prendre part à cette castration idéologique lorsque l'enfant est orphelin. La scolarisation de l'enfant n'est qu'une suite logique. Le programme scolaire veut tout dire en ce sens : on cherche à programmer l'enfant à une certaine culture limitée. Surtout ne cherchons pas à éveiller l'enfant sur des discours contradictoires qui le pousseraient à réfléchir. Il s'agit d'un sectarisme à faire pâlir la scientologie mais ceci est un autre débat.
J'exclus également la figure paternelle dans le sens où celle-ci occupe une fonction différente dans le couple. Ce rôle est cautionné et défini par la dominance féministe du couple. Le père sera donc plus permissif que la mère, à moins d'un profond sillage dans les valeurs parentales (dans le cas de l'homosexualité, celui-ci est de taille). Dans les deux cas de l'homosexualité féminine et masculine, l'autorité supposée du père, et je dis bien supposée car elle n'existe que sous la tolérance de la mère, est remise en cause. L'homosexualité est pour moi une nouvelle forme de féminisme dans le sens où il faut revendiquer son identité propre.
L'intime est donc un canal précieux pour réduire notre conscience plurielle et différentielle du monde à un sens unique.
La communauté familiale, et à plus forte raison celle du couple, est par conséquent véritablement une forme de cancérologie pandémique. La famille, autiste et narcissique, représente notre repère prééminent en matière de valeurs. Nous sommes, dès lors que nous naissons, assujettis à un mode de pensée qui gangrène notre rite initiatique de la découverte du « dehors » (j'entends par dehors la porte, souvent dissimulée, de la maison familiale et/ou coloniale). En second lieu, l'éducation, notamment scolaire, est continuation et succession systématiques du patron familial. Nous tentons désespérément de reconstruire le schéma matriarcal que nous avons connu. Il est pour nous une question de survie.
Et je prends exemple sur vous, cher confrère, en terminant mon courrier par un cas de figure : on dit souvent qu'un enfant battu deviendra un parent battant mais je m'inscris en faux. Cette maxime débile conduit l'enfant, victime de violence, dans un déterminisme outrancier qui le condamne dans sa chair de manière anticipée. Même si celui-ci arrive à s'en extraire, sa condition passée resurgira par l’intermédiaire de tiers bien-pensants. On peut aller plus loin et faire un rapprochement, au reste violent mais nécessaire, avec cette fameuse loi française sur la rétention de sûreté. Je suis un danger stigmatisé, reconnu de tous, et contraint par une moraline sirupeuse. Le fait de lui rappeler sans cesse son état conduira inexorablement cet être a commettre le même schéma parental. Il est donc nécessaire de prodiguer au plus tôt une ablation du concept famille. Le concept matriarcal ne peut être régi que par des lois religieuses dont il faut se défaire pour oser affronter la terrible indépendance.

Cordialement,

K.B

3 commentaires:

David Hébert a dit…

L'idée de rompre avec le concept de la famille est intéressante, mais il m'apparaît difficile de concevoir ce qu'il en adviendrait de l'individu, sans compter qu'il n'est pas évident de substituer le concept famille à quelque chose d'autre. Peut-être serait-il plus juste de "modifier" ce concept ? Ou encore réfléchir à une autre façon qui permettrait à l'enfant d'apprendre sans subir les inconvénients de l'égoïsme maternel ? Bref, billet très intéressant, qui suscite de nombreux questionnements.
Au plaisir de vous relire !

Messieurs Bouachiche / Deveureux. a dit…

Mon cher Monsieur David H.,

Je ne prétends pas qu'une facilité à rompre existe. Je ne suis qu'un petit sociologue qui constate certains mécanismes du genre humain. La cellule familiale est souvent le théâtre d'une dualité paradoxale. Elle peut se définir à la fois comme salvatrice par le soutien que souvent elle opère, mais aussi, à l'inverse, elle bascule parfois dans l'acharnement protecteur. Le facteur de l'intime est grandement responsable de ce basculement. Il voile le bien-fondé de nos actions et provoque la constrution d'une enveloppe protectrice indestructible autour du milieu familial, permettant ainsi toutes les perversités. En matière de criminalité pédophile, les deux tiers des faits se déroulent dans le milieu familial ou proche. Ne soyons pas dupes!
La communauté des "Roms" est un cas de figure intéressant. Nombreux sont les enfants qui plongent dans ce choix de vie nomade par manque de découverte d'une possibilité différente de choix de vie. La famille vous donne le même film à regarder tout au long de votre vie. Il est donc normal que le petit Sacir ne puisse envisager sa vie autrement qu'à la manière dont elle est disposée par ses parents. Le film grandiose de monsieur Ettore S., j'ai nommé Brutti, sporchi e cattivi, est un exemple exquis. Rompre n'est peut-être pas tellement si ardu. Ouvrir les yeux sur les multiples possibilités de la vie et ouvrir sa porte aux opportunités est bien plus complexe.
Nous ne pouvons donc ni modifier, ni même substituer ce concept.
L'allégeance maternelle relève de la génétique et elle perdure même après la vie. Alors que faire ? Je ne cesse de le répéter : utiliser notre don de curiosité afin d'enclencher des expériences contraires (et contrariantes). La difficulté ne peut être que libératrice.

A vous,

K. Bouachiche

Messieurs Bouachiche / Deveureux. a dit…

Réfléchissant au problème un peu à contretemps, je me disais que le concept qui serait à promouvoir pourrait être celui de "défamiliarisation". Un seuil de tolérance envers la famille doit être décrété afin de mieux repérer quelles sont les expériences de "défamiliarisation" et quelles sont celles qui au contraire accentuent le pouvoir familial. Ce seuil de tolérance, à mon avis, est à chercher du côté de l'intime.

K. Deveureux.