
Mon cher Bouachiche,
Il faut croire qu’une technologie comme internet a décimé le monument de l’homme. Les plus optimistes trompent leur cerveau par une série d’espérances qui ne fait que trahir leur manque d’arguments. Mes étudiants soutiennent que les gens sont propriétaires d’assez de discernement pour savoir agir hors de la sphère virtuelle que représente le territoire d’internet. Je leur demande alors de me spécifier un type d’action qui dériverait ou qui s’émanciperait d’internet. Ils ne m’affirment que des banalités : fréquenter des copains, faire des commissions, aller au sport, participer à la vie politique etc. Ils ne se rendent pas compte que le domaine tentaculaire des mondes virtuels a posé ses ventouses là où les aspérités sont les meilleures : l’égo et le sexe, le Moi et l’appendice, l’être et son relief. Qu’on flatte les imaginations dépendantes comme on triture les sexes mous (asséchés chez les femmes), et l’on obtient la solution de l’harmonie. Internet est populaire car il vend des images qui touchent la subjectivité alors que toute vérité est objective : l’adolescent un peu laid s’invente un bikini pour évacuer le petit lait qui se caille, le chômeur de longue durée se motive en grossissant ses sites favoris de sites travaillistes, le fumiste consulte Wikipédia pour se constituer la science d’un repas parce qu’il y a de la noblesse à commenter la gastronomie en l’enrobant de citations, et Facebook accouche de groupes pour le plaisir de cumuler des « fanatiques » en augmentant les statistiques. Autrement dit, internet soulage toutes les volontés pendant que l’intellect subit la jachère. Mon propos ne consiste pas pour autant à exposer le contraire de ce que je dénonce, à savoir une société de savants cyniques, il se veut juste un avertissement thérapeutique. Ma pensée se résumerait de la sorte (très à proximité de ce que Schopenhauer a raconté les soirs d’hiver à son caniche) : l’intelligence est pouvoir d’objectivité; constamment menacée par les bassesses du vouloir, l’intelligence s’épuise et finit par se confondre en un cerveau de chien errant. Où l’action n’a plus de valeur dans l’agir car le sujet est déconnecté du monde objectif, ce même sujet, tel le chien qui se promène en poursuivant l’odeur des poubelles, marque des territoires. La vie ne se définit plus par la vertu, elle se détermine plutôt par le plaisir personnel de dire « J’ai été ici », « J’ai été à cette fête », « J’ai possédé cette femme », et ainsi de suite, sans nécessairement ajouter de subordonnée complétive. En bout de ligne il n’y a que le JE qui s’exprime, dans l’expectative de son adoubement. À la morale de l’action succède la morale de l’attraction de soi : internet permet à chacun de se prendre pour une entreprise qui a pouvoir de décider qui elle embauche et qui elle licencie. L’attraction de soi n’est que plus effective si un statut Facebook vient faire office de redondance. Qui douterait que son réseau d’amis ne se souvient pas des événements de l’heure écoulée, ne tarderait donc pas à écrire un sommet de science sur son profil : « Super la fête de ce soir ! ». Il signifie par là que ses employés approuvent sa politique de travail. Ceci dit, comme le commerce n’est pas toujours équitable, il y a des concurrents, et ce sont eux qu’il faut dénigrer, éliminer, délocaliser. La publicité de soi en tant que passion de se vendre, ce n’est que cela qui se déduit. L’avatar est la lettre de change du virtuel quand le corps a échoué à être dans le monde.
Il est donc aisé de conduire une société malgré la tendance au gigantisme de certains pays. Puisque le Web relit les personnes, il est le nouvel opium du peuple, la nouvelle suture ontologique qui substitue les dieux du monothéisme en bâtissant des Olympes çà et là. La suprématie sociale se mesure au nombre de ses fans (sur Facebook ou ailleurs). Alors que je ne m’investis sur ce réseau qu’à dessein d’y sonder les plus sombres facettes de la bêtise, un certain monsieur JBC a osé me contacter pour me dire quelque chose de scandaleusement familier : « Je suis fan de vous, j’ai créé un groupe et j’aimerais que vous en fassiez partie ». À l’évidence, je n’ai même pas pris le soin de répondre à ce petit avorton. Toutefois une vérification rapide m’a rassuré sur l’état de notre Olympe : vous et moi, cher collègue, n’avons que deux fans selon les données du groupe de monsieur JBC. Voulez-vous que je vous dise ? Cela me rassure sur l’état de ce que nous enseignons : la sociologie et la philosophie n’appartiennent pas aux mondes virtuels, elles discutent de ces mondes. Ici même, nous discutons entre nous. Il est réjouissant de ne pas crouler sous les commentaires insupportablement stériles même si nous en avons essuyé quelques-uns. Nous n’avons pas de compte à rendre, et si la population suppose qu’une discussion est possible, elle devra s’acquitter des principes de la critique kantienne pour ne pas que les débats se terminent là où commence le conflit d’opinions. Une vraie discussion n’a pas de fin, on se résout à la clôturer. Une fausse discussion est bruyante, confondue par l’intérêt de se faire remarquer, entrecoupée d’approximations et fondamentalement limitée par les emplois du temps de ceux qui ne méritent même pas qu’on les écoute. Pourquoi ne puis-je parler à un étudiant ? Parce que je sais qu’il ne sait pas, alors je voudrais qu’il le sache et qu’il ne vienne pas me déranger. L’étudiant, en sachant son ignorance, réussira à réanimer son intelligence sous sédatifs. Or la majorité des élèves perd du temps à un âge où leurs cerveaux sont pourtant les plus réceptifs du point de vue biologique. Ils ont des engagements amoureux, des émissions de télévision à voir, des domaines « olympiques » à entretenir, des meubles à aller choisir pour leur appartement qui ne symbolise que l’avant-scène de leur caveau familial. Ils gaspillent leur temps alors qu’ils apprendraient beaucoup plus en étant seuls, sans autre forme de société que celle du cerveau. Mon ambition est vaste : assassiner les corps par un cancer inversé des cervelles. J’aimerais qu’une hémorragie de neurones emplisse les phallus pour que les saillies soient épistémologiques. J’aimerais que la crasse nullité des femmes se guérisse par des sodomies informatives. Mais cela n’est pas vraiment envisageable. Les femmes s’habillent en vagins disponibles, semblables les unes aux autres, exigeant de certains chefs qu’ils leur fassent signer un contrat longue durée. Mais puis-je vraiment choisir dans le semblable ? On me demande donc de préférer une prostituée à une autre, ce que je ne saurais faire.
Par conséquent, un tel convoite son Olympe, un tel est jaloux, puis un tel se renfrogne en accomplissant l’acte le plus séditieux du XXIème siècle : il signifie sa désapprobation en quittant le groupe d’un tel et en rejoignant la société de tel autre. Sans autre forme de procès qu’un jeu de saute mouton, les avatars d’Internet galopent, batifolent, marivaudent.
Le dehors s’assimile au monde virtuel à une exception près : ce que je peux faire sur Internet, je ne le fais pas dehors. Ainsi le dehors s’aseptise. Il y a un décalage maladif entre la profusion des actions virtuelles et la rareté des actions effectives. Le seul moyen d’exister dans le dehors, c’est de mourir. Je préconise le suicide des avatars par le suicide de leurs patrons respectifs : qui ne sait plus exactement comment il s’appelle doit se suicider de façon spectaculaire pour avoir le plaisir d’avoir agi de manière autonome. Dans les grandes métropoles, les usagers des transports en commun se plaignent des retards. En ce qui me concerne, je salue les personnes qui se suicident dans le métro. Je veux ici même encourager le suicide en public s’il est une preuve d’action autonome. Tant pis pour les jeunes femmes complexées qui se vident de leur sang dans les baignoires; elles gagneront en autonomie en se tirant une balle dans la tête dans l’autobus. Car n’oublions pas une chose, cher Bouachiche, l’avatar est certes un déguisement de la médiocrité, mais il est bien plus encore, c’est-à-dire qu’il est une liposuccion, une étape de l’esthétique de soi, un premier pas vers la falsification de sa personne. « Lolita », le plus souvent, dissimule une adolescente au physique ingrat, éventuellement anorexique, mais qui se transformera en redoutable séductrice pour qui ne sait pas distinguer le discours romantique véritable d’une pâle imitation d’intelligence verbale. L’anorexique, dont le corps est moins visible que sa copine éventuellement boulimique, doit encore plus que les autres chercher le spectaculaire de sa fin. Un petit corps, ainsi, doit réfléchir davantage : déjà qu’il est relativement invisible aux yeux de la société hypocrite, il est nécessaire que sa petitesse adopte un moyen de reconnaissance ostensible. Si donc des anorexiques venaient à lire ce message, je leur conseille d’aller se noyer dans les fontaines catholiques où l’on jette des pièces à destination de son intercesseur chérubinique. Non seulement elles feront hommage à Notre-Dame des Douleurs, mais en plus elles gonfleront sous l’effet de la noyade, ce qui leur donnera la consistance qu’elles n’avaient point dans l’existence en même temps que cela épouvantera les âmes. Et plus tard, dans la soirée, des commentaires outrecuidants suivront sur Facebook : « Honteux de se tuer dans les fontaines de Dieu ! ». Quoi qu’il en soit, pas moins honteux que de faire semblant de compatir dans le monde pour ensuite détester dans le virtuel. C’est là une racine du nouveau nazisme : le virtuel juge et condamne, le monde objectif s’emprisonne. Pas étonnant, mon cher Bouachiche, que nous ne soyons que deux à nous entendre. Nous disons objectivement ce que tout le monde accepte virtuellement en le contestant toutefois dans le réel. Pour quelle raison ? Parce que le virtuel n’engage à rien tandis que le réel rendrait effective l’inutilité des sainte-nitouches qui se plaignent de gens comme nous tout en devenant pires derrière leurs Avatars. Il vaut mieux paraître qu’être quand l’être a disparu dans un je ne sais quoi de propagande subjective. Puissent les avatars se souvenir que Goebbels, un maître de propagande, a fini par opter pour les recommandations du suicide. Ce fut son autonomie parmi le système qui lui soufflait son existence. Goebbels, de la sorte, est un meilleur mort que ses collègues qui ont attendu la pendaison. Il fut une fois autonome quand les autres furent jusqu’au bout des avatars.
À vous pacha Bouachiche,
K. Deveureux
Il faut croire qu’une technologie comme internet a décimé le monument de l’homme. Les plus optimistes trompent leur cerveau par une série d’espérances qui ne fait que trahir leur manque d’arguments. Mes étudiants soutiennent que les gens sont propriétaires d’assez de discernement pour savoir agir hors de la sphère virtuelle que représente le territoire d’internet. Je leur demande alors de me spécifier un type d’action qui dériverait ou qui s’émanciperait d’internet. Ils ne m’affirment que des banalités : fréquenter des copains, faire des commissions, aller au sport, participer à la vie politique etc. Ils ne se rendent pas compte que le domaine tentaculaire des mondes virtuels a posé ses ventouses là où les aspérités sont les meilleures : l’égo et le sexe, le Moi et l’appendice, l’être et son relief. Qu’on flatte les imaginations dépendantes comme on triture les sexes mous (asséchés chez les femmes), et l’on obtient la solution de l’harmonie. Internet est populaire car il vend des images qui touchent la subjectivité alors que toute vérité est objective : l’adolescent un peu laid s’invente un bikini pour évacuer le petit lait qui se caille, le chômeur de longue durée se motive en grossissant ses sites favoris de sites travaillistes, le fumiste consulte Wikipédia pour se constituer la science d’un repas parce qu’il y a de la noblesse à commenter la gastronomie en l’enrobant de citations, et Facebook accouche de groupes pour le plaisir de cumuler des « fanatiques » en augmentant les statistiques. Autrement dit, internet soulage toutes les volontés pendant que l’intellect subit la jachère. Mon propos ne consiste pas pour autant à exposer le contraire de ce que je dénonce, à savoir une société de savants cyniques, il se veut juste un avertissement thérapeutique. Ma pensée se résumerait de la sorte (très à proximité de ce que Schopenhauer a raconté les soirs d’hiver à son caniche) : l’intelligence est pouvoir d’objectivité; constamment menacée par les bassesses du vouloir, l’intelligence s’épuise et finit par se confondre en un cerveau de chien errant. Où l’action n’a plus de valeur dans l’agir car le sujet est déconnecté du monde objectif, ce même sujet, tel le chien qui se promène en poursuivant l’odeur des poubelles, marque des territoires. La vie ne se définit plus par la vertu, elle se détermine plutôt par le plaisir personnel de dire « J’ai été ici », « J’ai été à cette fête », « J’ai possédé cette femme », et ainsi de suite, sans nécessairement ajouter de subordonnée complétive. En bout de ligne il n’y a que le JE qui s’exprime, dans l’expectative de son adoubement. À la morale de l’action succède la morale de l’attraction de soi : internet permet à chacun de se prendre pour une entreprise qui a pouvoir de décider qui elle embauche et qui elle licencie. L’attraction de soi n’est que plus effective si un statut Facebook vient faire office de redondance. Qui douterait que son réseau d’amis ne se souvient pas des événements de l’heure écoulée, ne tarderait donc pas à écrire un sommet de science sur son profil : « Super la fête de ce soir ! ». Il signifie par là que ses employés approuvent sa politique de travail. Ceci dit, comme le commerce n’est pas toujours équitable, il y a des concurrents, et ce sont eux qu’il faut dénigrer, éliminer, délocaliser. La publicité de soi en tant que passion de se vendre, ce n’est que cela qui se déduit. L’avatar est la lettre de change du virtuel quand le corps a échoué à être dans le monde.
Il est donc aisé de conduire une société malgré la tendance au gigantisme de certains pays. Puisque le Web relit les personnes, il est le nouvel opium du peuple, la nouvelle suture ontologique qui substitue les dieux du monothéisme en bâtissant des Olympes çà et là. La suprématie sociale se mesure au nombre de ses fans (sur Facebook ou ailleurs). Alors que je ne m’investis sur ce réseau qu’à dessein d’y sonder les plus sombres facettes de la bêtise, un certain monsieur JBC a osé me contacter pour me dire quelque chose de scandaleusement familier : « Je suis fan de vous, j’ai créé un groupe et j’aimerais que vous en fassiez partie ». À l’évidence, je n’ai même pas pris le soin de répondre à ce petit avorton. Toutefois une vérification rapide m’a rassuré sur l’état de notre Olympe : vous et moi, cher collègue, n’avons que deux fans selon les données du groupe de monsieur JBC. Voulez-vous que je vous dise ? Cela me rassure sur l’état de ce que nous enseignons : la sociologie et la philosophie n’appartiennent pas aux mondes virtuels, elles discutent de ces mondes. Ici même, nous discutons entre nous. Il est réjouissant de ne pas crouler sous les commentaires insupportablement stériles même si nous en avons essuyé quelques-uns. Nous n’avons pas de compte à rendre, et si la population suppose qu’une discussion est possible, elle devra s’acquitter des principes de la critique kantienne pour ne pas que les débats se terminent là où commence le conflit d’opinions. Une vraie discussion n’a pas de fin, on se résout à la clôturer. Une fausse discussion est bruyante, confondue par l’intérêt de se faire remarquer, entrecoupée d’approximations et fondamentalement limitée par les emplois du temps de ceux qui ne méritent même pas qu’on les écoute. Pourquoi ne puis-je parler à un étudiant ? Parce que je sais qu’il ne sait pas, alors je voudrais qu’il le sache et qu’il ne vienne pas me déranger. L’étudiant, en sachant son ignorance, réussira à réanimer son intelligence sous sédatifs. Or la majorité des élèves perd du temps à un âge où leurs cerveaux sont pourtant les plus réceptifs du point de vue biologique. Ils ont des engagements amoureux, des émissions de télévision à voir, des domaines « olympiques » à entretenir, des meubles à aller choisir pour leur appartement qui ne symbolise que l’avant-scène de leur caveau familial. Ils gaspillent leur temps alors qu’ils apprendraient beaucoup plus en étant seuls, sans autre forme de société que celle du cerveau. Mon ambition est vaste : assassiner les corps par un cancer inversé des cervelles. J’aimerais qu’une hémorragie de neurones emplisse les phallus pour que les saillies soient épistémologiques. J’aimerais que la crasse nullité des femmes se guérisse par des sodomies informatives. Mais cela n’est pas vraiment envisageable. Les femmes s’habillent en vagins disponibles, semblables les unes aux autres, exigeant de certains chefs qu’ils leur fassent signer un contrat longue durée. Mais puis-je vraiment choisir dans le semblable ? On me demande donc de préférer une prostituée à une autre, ce que je ne saurais faire.
Par conséquent, un tel convoite son Olympe, un tel est jaloux, puis un tel se renfrogne en accomplissant l’acte le plus séditieux du XXIème siècle : il signifie sa désapprobation en quittant le groupe d’un tel et en rejoignant la société de tel autre. Sans autre forme de procès qu’un jeu de saute mouton, les avatars d’Internet galopent, batifolent, marivaudent.
Le dehors s’assimile au monde virtuel à une exception près : ce que je peux faire sur Internet, je ne le fais pas dehors. Ainsi le dehors s’aseptise. Il y a un décalage maladif entre la profusion des actions virtuelles et la rareté des actions effectives. Le seul moyen d’exister dans le dehors, c’est de mourir. Je préconise le suicide des avatars par le suicide de leurs patrons respectifs : qui ne sait plus exactement comment il s’appelle doit se suicider de façon spectaculaire pour avoir le plaisir d’avoir agi de manière autonome. Dans les grandes métropoles, les usagers des transports en commun se plaignent des retards. En ce qui me concerne, je salue les personnes qui se suicident dans le métro. Je veux ici même encourager le suicide en public s’il est une preuve d’action autonome. Tant pis pour les jeunes femmes complexées qui se vident de leur sang dans les baignoires; elles gagneront en autonomie en se tirant une balle dans la tête dans l’autobus. Car n’oublions pas une chose, cher Bouachiche, l’avatar est certes un déguisement de la médiocrité, mais il est bien plus encore, c’est-à-dire qu’il est une liposuccion, une étape de l’esthétique de soi, un premier pas vers la falsification de sa personne. « Lolita », le plus souvent, dissimule une adolescente au physique ingrat, éventuellement anorexique, mais qui se transformera en redoutable séductrice pour qui ne sait pas distinguer le discours romantique véritable d’une pâle imitation d’intelligence verbale. L’anorexique, dont le corps est moins visible que sa copine éventuellement boulimique, doit encore plus que les autres chercher le spectaculaire de sa fin. Un petit corps, ainsi, doit réfléchir davantage : déjà qu’il est relativement invisible aux yeux de la société hypocrite, il est nécessaire que sa petitesse adopte un moyen de reconnaissance ostensible. Si donc des anorexiques venaient à lire ce message, je leur conseille d’aller se noyer dans les fontaines catholiques où l’on jette des pièces à destination de son intercesseur chérubinique. Non seulement elles feront hommage à Notre-Dame des Douleurs, mais en plus elles gonfleront sous l’effet de la noyade, ce qui leur donnera la consistance qu’elles n’avaient point dans l’existence en même temps que cela épouvantera les âmes. Et plus tard, dans la soirée, des commentaires outrecuidants suivront sur Facebook : « Honteux de se tuer dans les fontaines de Dieu ! ». Quoi qu’il en soit, pas moins honteux que de faire semblant de compatir dans le monde pour ensuite détester dans le virtuel. C’est là une racine du nouveau nazisme : le virtuel juge et condamne, le monde objectif s’emprisonne. Pas étonnant, mon cher Bouachiche, que nous ne soyons que deux à nous entendre. Nous disons objectivement ce que tout le monde accepte virtuellement en le contestant toutefois dans le réel. Pour quelle raison ? Parce que le virtuel n’engage à rien tandis que le réel rendrait effective l’inutilité des sainte-nitouches qui se plaignent de gens comme nous tout en devenant pires derrière leurs Avatars. Il vaut mieux paraître qu’être quand l’être a disparu dans un je ne sais quoi de propagande subjective. Puissent les avatars se souvenir que Goebbels, un maître de propagande, a fini par opter pour les recommandations du suicide. Ce fut son autonomie parmi le système qui lui soufflait son existence. Goebbels, de la sorte, est un meilleur mort que ses collègues qui ont attendu la pendaison. Il fut une fois autonome quand les autres furent jusqu’au bout des avatars.
À vous pacha Bouachiche,
K. Deveureux