vendredi 5 février 2010

Human compost.


Mon cher collègue,

Je comptais sur ce nouveau courrier pour vous faire part de mes nouvelles recherches sur la sociologie de groupe dans les cultures comoriennes installées à Marseille mais l’actualité m’oblige à revoir ma copie et je ne peux me soustraire à ce compost humain présent en Haïti. Je vais donc employer un lexique écologiste pour vous transmettre mes consternations face à ce fléau naturel. Bien sûr, me connaissant, vous aurez parfaitement compris que le nom de « fléau naturel » ne se rapporte en rien à la catastrophe sismique de cette île. Ma référence s'adresse davantage à la déferlante colonialiste des aides internationales. Il est vraiment jubilatoire d’observer que ces terres en jachère depuis des décennies deviennent subitement une terre fertile grâce à un compostage humain riche en sédimentation.
Alors analysons ce phénomène qui pousse l’homme d’origine nord-hémisphérique à un acharnement forcené pour sauver quelques vies qui, en elles-mêmes, ne comptaient pas plus que celles de leurs « bien-aimés toutous » avant ce drame. L’esprit des colons persiste et signe. La nausée est prenante. L’engouement populaire pour ces vies labourées depuis des années par le tracteur du profit avec le regard inquisiteur de la compassion me donne le cancer des émotions. Est-ce que je remets en cause le bien fondé de ces grossistes politiciens qui n’y voient qu’une stratégie géopolitique ? Oui, et je le crie bien haut. Il est honteux que le marchand de blé ne ramasse les fanes haïtiennes que dans le seul objectif d’être présent sur une avant-scène internationale. Manœuvres scandaleuses afin de semer quelques bonnes intentions de vote auprès de ses concitoyens. Je me pose donc la question globale du monde accessible à toute heure du jour et de la nuit comme on sert des hamburgers spongieux au « drive » d’un fast-food. Les organes de presse restent des déchets toxiques dont le recyclage est devenu impossible. La seule solution envisagée est donc de resservir ces charognes dans un pain blanc mou distribué par un clown dépravé. Ces cadavres fumants, à la couleur café, ne servent qu’à occuper le temps libre de médecins occidentaux à la retraite. Ils jouent aux héros, et dans le même temps, une partie des populations noires africaines meurt dans l’inconscience collective. La tragédie haïtienne n’est que la vitrine d’un « baby shop » où le Blanc bien intégré avec une morale à deux sous cherche à adopter un petit Noir pour être raccord avec sa sacoche en cuir. Le fondement de cette déviation est la conception même de l’économie. Le dollar devient la référence humaine dans toutes les communautés qui parcourent le monde. Et on ose parler de solidarité ! Mais au fond qu’est-ce que la solidarité face à des plaies béantes depuis tant d’années ? Peut-on m’en donner une définition plausible ?
Je vais pousser la provocation en osant révéler quelques propos insoutenables qui néanmoins nous obligeront à reconsidérer nos réflexions les plus niaises. Ce séisme en Haïti est un véritable renouveau, une chance à la population locale de se réinventer un système plus juste. Mais nous n’en arriverons pas là parce que les ONG font du business avec la souffrance afin que les pauvres petits Blancs se sentent utiles dans leurs vies si pathétiques et si misérables. Il est facile d’envoyer un message surtaxé pour libérer la conscience de son ignorance.
Je vais encore plus loin dans mes propos. Durant les camps de la mort, les nazis ont eu cette idée magnifique de recycler les corps des Juifs qu’ils tuaient à la chaîne. L’idée merveilleuse de faire du papier avec de la peau, et du savon avec de la graisse, est prodigieuse d’avant-garde. Ces hommes ont eu le courage d’aller au fond des choses en proposant une véritable pensée inconsciente, c’est-à-dire cette pensée que l’être humain « inférieur » devait servir à la production active de l’homme Blanc. Certains prendront ces propos au premier degré mais je n'en ai que faire. Ne soyons pas dupes : il est obligatoire, dans l'ordre établi des Occidentaux, que les hommes à la couleur de peau sombre doivent mourir par dizaines pour maintenir le train de vie d’un seul homme Blanc. C’est une logique de marché et nous n’y pouvons rien. Ainsi le séisme en Haïti n’est qu’un remède à la crise monétaire mondiale.
L'être humain issu de majorité visible mais ignorée est un engrais naturel pour la vie confortable de l’homme bien pensant. Nous devons donc cesser de globaliser les flux monétaires. Ainsi nous obtiendrons un système sociétal plus juste et plus près de nos réalités socio-ethniques. Je m’explique. Un groupe à l’économie locale donne des perspectives économiques à courtes échelles qui permettent une véritable agronomie à taille humaine. Le facteur réussite de ce groupe réside principalement dans la structure même des éléments qui la composent. La mixité est nécessaire pour que le groupe de population ne se greffe pas dans le même sens. Une vision plus proche de notre environnement direct représente la garantie durable d'une réflexion saine et d'un développement social équitable. Je disais hier qu'une tectonique des comportements humains existait, j'affirme aujourd'hui qu'un compostage des vies misérables est nécessaire dans la logique de marché capitaliste.

Rageusement,

K.B

1 commentaire:

Hipihipi a dit…

Comme en alchimie, tout est un, un est tout ! Truculente cette photo ! :-)