mardi 23 décembre 2008

Iddo Jacobi témoigne.


Cher collègue, de nouveau je me manifeste à vous car je n'ai pas été indifférent à votre nostalgie légitime envers Iddo Jacobi, fin politicien du millésime 2001. J'ai retrouvé un document que Le Figaro avait publié en substance de ses pages politiques. En fait, Jacobi témoigne des péripéties qui ont été causées par son engagement politique novateur. Devant l'incompréhension générale de son attitude pourtant altruiste, je crois nécessaire de publier ici ce document qui a trop été endigué par les lourdes actualités de l'époque. Vous le savez sûrement mais ce n'est pas le cas de nos lecteurs, Iddo Jacobi est ensuite décédé quelques mois plus tard dans la paisible ville de Nicosie. Relisons donc ce témoignage éclairé et imprégnons-nous de cette sagesse insigne.


« La nature est ingrate. Je fais ce constat car tous les jours je m’aperçois que la dimension du corps dépasse allègrement les mérites de l’esprit. Mon entrée en politique a fait des vagues parce que j’ai osé présenter le visage de ma politique en exhibant mon portrait sur les affiches électorales. J’estimais que mon visage était le meilleur accès aux fondements de mes projets. Projeté sur l’affiche, je croyais en dire plus que lors d’un éventuel discours sophistiqué qui aurait ennuyé tout le monde, à commencer par moi. C’est la raison pour laquelle j’avais opté pour un slogan sommaire et tout à fait synoptique de cet engagement populaire : DIFFERER POUR MIEUX REGNER. Des critiques tout ce qu’il y a de plus abject m’ont reproché de vouloir instaurer une royauté néfaste aux principes démocratiques. N’ayant pas saisi l’objet d’un tel assaut, j’ai décidé de clarifier mes intentions. Je comptais sur l’esprit ouvert des électeurs, je n’ai récolté que mépris et moqueries diverses. Je réponds qu’une royauté exige la présence d’un royaume, or je ne pouvais pas édifier un royaume dans la sphère locale puisque je me présentais à des élections municipales. Dans cet ordre d’idée, j’aurais trouvé stupide de ma part de jouer sur les émotions en organisant des réunions de quartier dans le seul but d’expliquer les tenants et les aboutissants de mon handicap. A ce titre, l’image s’exprimait mieux que la parole. Aujourd’hui je l’affirme sans aucune vergogne : je souffre de franco-céphalite, c'est-à-dire que mon profil est comparable à la France en ce sens que ma bouche, ostensiblement incurvée, se superpose au bassin d’Arcachon, tout comme le haut de mon crâne, fortement bosselé et accidenté, se réfléchit dans les contours du Nord ainsi que du Pas-de-Calais. Ce ne sont que des exemples non exhaustifs, je crois que vous comprenez l’ampleur d’une situation comme la mienne.

Mon désir le plus subtil n’a pas été exaucé. J’aurais aimé que l’on arrête de me dévisager avec des regards inquisiteurs. J’aurais aimé qu’on transcende le visage pour aller chercher la cause de sa présence sérielle sur les murs de la ville. Las ! La plupart n’y ont vu qu’une mosaïque infâme, une répétition du pire, voire une offrande franc-maçonnique. N’ayant su trouver les ressources nécessaires pour faire succomber ces manifestations belliqueuses, j’ai convoqué en dernier recours ma liste électorale ainsi que les personnes qui s’étaient abonnées à mon parti (IDF : Infirmes de France). Le chapiteau que la mairie nous avait alloué a été saccagé par des vandales. Le lendemain, j’ai reçu une lettre anonyme particulièrement désagréable, revendiquant cet attentat au bon sens, et signée par un groupe d’opposition répondant à l’acronyme suivant : JADF (Jeunesses Aryennes de France). J’ai voulu supposer une mauvaise plaisanterie juvénile, or une enquête de terrain conduite par Khalid Bouachiche et un contingent de policiers compétents a conclu tout autrement mes faibles prémonitions. Il s’avérait que ces jeunesses n’étaient en fait qu’un affreux masque de dissimulation, masque qui n’aurait trompé qu’un esprit primesautier. Nous avons alors consécutivement arrêté le cerveau des prétendues JADF, à savoir M. Jean-Daniel Rouif, ainsi que ses thuriféraires, tous âgés de plus de soixante-dix ans et considérablement motivés par des relents fascisants d’une extrême pauvreté intellectuelle. J’ai asséné le coup de grâce en même temps que j’ai quitté la vie politique. Ces mots ont clôturé ma démarche : « Que le nature est ingrate, je le savais, mais que les gens puissent autant se foutre de votre gueule, ça, je l’ignorais. ». En sus, j’ai pointé du doigt une nouveau type de délinquance : la délinquance sénile ».

Aucun commentaire: