mardi 2 décembre 2008

Inceste et égocentrisme.


Cher ami,

Ce matin, lors de ma promenade habituelle dans les rues de Gabès, une douce musique se mit à tinter dans mes oreilles. « L'aigle noir », et surtout Barbara, me rappellent tellement de bons souvenirs. J'ai eu la chance de la rencontrer lors de son fameux concert à l'Olympia un samedi de 78. Sa beauté noire et profonde m'inspire chaque jour que Dieu ne fait pas. Ainsi ce texte m'interrogea sur l'amour incestueux. En effet, sous couvert de mots poétiques, la chanteuse nous fait part de cette marque indélébile du Bonheur ou du Malheur suivant le côté où l'on se place. Le mien est tout trouvé : n'est-ce finalement pas la forme la plus pure de la relation affective ?
La liaison interdite, la "do not cross" amoureuse est un sujet qui, sociologiquement parlant, m'intéresse beaucoup.
Peut-on réellement prétendre aimer son enfant au point de le désirer physiquement ?
Est-ce une manifestation physiologique ou matérielle de ce sentiment que l'on appelle amour ?
Peut-on parler d'un amour déstructurant ?
Mais au fond cette expression intelligible n'est-elle pas, en elle-même, antinomique? Je me plais à croire qu'il s'agit là d'une forme de désir protecteur des plus flatteurs, des plus purs. Une quintessence entremêlée, qui pousse l'être humain vers une porte de sortie. Cette porte de sortie est bien celle de notre société puritaine. Attention, cher confrère, je ne cautionne pas un tel acte et je n'en fais pas non plus une revendication féroce, mais il me semble que c'est notre propre culture du monde qui pousse les gens à perpétrer de tels actes. Et il me semble qu'en l'état actuel des choses nous ne pouvons l'ignorer. Et tout le problème de cette population pénale se pose. Que faut-il faire ? Une véritable chasse aux sorcières se perpétue... Mais nous sommes victimes de notre propre quête du bonheur ou, devrais-je dire, du bien être, qui nous envoie vers une dimension bicéphale de l'amour. Vous le démontrez parfaitement dans votre courrier précédent en parlant du cas psychiatrique de mademoiselle P.
Et lorsque cette forme ne fonctionne pas, que nous reste-t-il comme branche pour nous raccrocher à notre survie sociétale ? Serait-il égocentrique de se cantonner à un amour solitaire ? Il est vrai que nous ne pouvons rarement nous décevoir nous-mêmes. Le narcissisme m'apparaît alors comme la seule conception du bonheur à laquelle je pourrais éventuellement croire. Notre quête identitaire n'est-elle pas la plus belle façon d'aimer ? Néanmoins je ne crois absolument pas en cette maxime prolétaire « Aime-toi et les autres t'aimeront. » Elle est réductrice et d'une puérilité des plus affligeantes.
Eh bien, la seule chose qui perdure, à mon sens, est peut-être l'amour filial.
Alors on dérive vers une étrange correspondance érotico-affective. Il est évident que je ne peux mêler à cette réflexion métaphysique les choses de la sexualité qui, bien sûr, ajoutent de nouvelles perspectives (le temps dont je dispose est bien trop court pour les explorer). Mais je pense que nous y reviendrons.
Je vous fais donc part de ma petite interrogation matinale, et vous prie de croire en mes amitiés les plus sincères.

Cordialement
K.B

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